En 1923 Anna Samweber passa des vacances à Dornach et eut l’occasion d’être active aussi en tant que gardienne du Goetheanum. Lors d’une ronde de nuit autour du bâtiment, elle eut une sorte de vision, dans laquelle elle vit Berlin monter en flammes. Secouée, elle décrivit son expérience au cours de la journée à Rudolf Steiner et lui posa la question suivante : « Docteur, l’Anthroposohie est une outre, à laquelle nous pouvons toujours nous abreuver, mais si un jour nous ne vous avons plus, pouvons-nous obtenir quelque chose pour Berlin ? ». Sur ce, Rudolf Steiner lui offrit les paroles « Aux amis de Berlin ».
Il voit, l’Homme,
Avec l’œil engendré par le monde extérieur ;
Ce qu’il voit le relie,
Aux joies et aux douleurs du monde ;
Cela le relie à tout ce qui devient,
Mais pas moins,
À tout ce qui chute,
Dans l’abîme d’un sombre royaume.
Il contemple, l’Homme,
Avec l’œil prodigué par l’Esprit ;
Ce qu’il contemple le relie,
À l’espoir spirituel et à la force de soutien spirituel ;
Cela le relie,
À tout ce qui s’enracine dans l’éternité
Et qui porte des fruits pour l’éternité.
Toutefois l’Homme ne peut contempler
Que lorsqu’il sent lui-même l’œil Intérieur
En tant que membre divin,
Qui, sur le théâtre de l’âme humaine,
Dans le temple du corps humain,
Accomplit les actes divins.
L’humanité est dans l’oubli
De l’être divin intime,
Nous toutefois, voulons le saisir
Dans la claire lumière de la conscience,
Et ensuite le porter, par dessus décombres et cendres,
Du feu des Dieux au sein des cœurs humains.
Ainsi peuvent être brisés en décombres
Les éclairs de nos demeures sensorielles.
Nous érigeons des demeures animiques
Du tissage de lumière, solide comme l’acier,
Procédant de la connaissance.
Et la chute de ce qui est le plus extérieur
Doit devenir essor
De ce qui au sein de l’âme, est le plus intime.
La souffrance pénètre
Du fait de puissances constituées de forces matérielles ;
L’espoir luit,
Même lorsque l’obscurité nous entoure ;
Et un jour futur,
Il pénétrera dans notre souvenir,
Lorsqu’après l’obscurité, à nouveau la possibilité nous aurons,
De vivre dans la lumière.
Nous ne voulons pas que cette source de lumière,
Un jour, en de futures clartés, nous manque,
Parce que nous ne l’avons pas, en cette période de souffrance,
Dans nos âmes, présentement enracinée.
Rudolf Steiner - Novembre 1923 - GA268