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Questionnements, essais et contenus portant sur divers aspects liés à la science de l'esprit (science initiatique moderne) de Rudolf Steiner.
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 « Le problème le plus important de toute la pensée humaine : Saisir l'être humain en tant qu'individualité libre, fondée en elle-même »
Vérité et Science, Rudolf Steiner

   

Citation
  • "un homme qui parle aujourd’hui de l’idéal racial, de l’idéal national, parle au nom d’impulsions de décadence. Et s’il croit, en parlant ainsi, proposer à l’humanité des idées qui servent le progrès, il s’abuse. Rien ne fera glisser l’humanité davantage sur la pente de la décadence que la diffusion d’idéaux fondés sur la race, sur le peuple, sur le sang. [...] Le véritable idéal devrait être puisé au monde spirituel, et non pas fondé sur le sang."
    GA177, pg 174-175 (Triades)

    Rudolf Steiner
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Vérité et mensonge


Extrait du reccueil de conférences « Les arrière-plans spirituels de la Première Guerre mondiale »
Stuttgart, le 23 avril 1918 - 14ème conférence
Rudolf Steiner – GA174b
Éditions anthroposophiques romandes (2010) -
Traduction : Jean-Marie Jenni

(…) Voici un exemple assez joli qui s’est passé ces derniers jours : dans un journal important a paru un article de Fritz Mauthner[1], le critique du langage. Ce Mauthner est un homme très intelligent, et il y critique vivement le petit livre de la collection « Nature et monde spirituel »[2]. Ce petit ouvrage présente les représentations astrologiques, tout à fait dans le sens de la science matérialiste actuelle, notamment comme elle est défendue aujourd’hui par un professeur d’université. Pour finir, l’auteur établit l’horoscope de Goethe, et montre comment on peut y lire le cours de la vie de Goethe. Mais à vrai dire il ne fait que se moquer de ceux qui prétendent tirer quoi que ce soit d’un horoscope. Il veut présenter l’horoscope comme pouvant dire tout et son contraire. 

Mauthner fulmine sur trois colonnes du Berliner Tagblatt. Or il n’y avait aucune raison du tout de fulminer, car il est en somme du même avis ; ils ont tous deux le même point de vue sur l’astrologie. L’auteur du petit livre a très vite fait paraître une rectification dans le journal, disant qu’il n’avait certes pas condamné l’astrologie toutes les trois lignes, mais qu’il la déconsidérait tout autant que Mauthner. Le Berliner Tagblatt – les journaux sont très intelligents – ajouta que Mauthner y rédigeait depuis de nombreuses années la critique théâtrale et qu’il écrivait maintenant une sorte de « lettre sur le théâtre » pour le journal.

Mauthner déclare de son côté qu’il n’a rien à redire à cette contre-critique. On était donc en présence de deux personnes du même avis qui se tapent dessus. Mauthner devient furieux dès qu’il voit le mot astrologie ou horoscope, car on ne s’explique pas sinon pourquoi il a attaqué cet article. Il écrit comme si l’autre était un affreux astrologue voulant démontrer la validité de l’horoscope de Goethe. Vous avez donc un exemple où deux personnes se battent ; l’une attaquant et l’autre étant réduite à se défendre bien malgré elle, alors qu’elles sont du même avis. Comment cela est-il possible ? Une telle chose ne peut se produire que si les deux personnes n’ont plus rien à faire de la réalité, même restreinte, dont il est question et parce qu’elles vivent autre chose que la réalité. C’est l’exemple le plus glorieux du fait qu’aujourd’hui on peut parler et parler intelligemment, car Mauthner est un homme intelligent, alors qu’il n’y a absolument rien derrière ces bavardages. Il n’y avait aucune raison à tout cela.

Vous avez là un exemple d’un édifice de pensées qui n’a rien à voir avec la réalité. C’est à cela que parviennent les pensées qui ont perdu l’habitude de prendre en compte la réalité de l’esprit, car alors elles perdent également tout contact avec la réalité matérielle. Il est important de le reconnaître. C’est là aussi l’affreuse gravité de cette situation. Peu importe en somme que se tapent dessus Mauthner et le professeur de Heidelberg, avec des paroles qui ne signifient rien puisqu’il n’y a rien derrière, ou que l’échange se joue entre deux politiciens, l’un aux États-Unis et l’autre en Europe, qui diront peut-être la même chose tout étant totalement opposés sur le fond. Si tous ceux qui prennent la parole sont totalement étrangers à la réalité des choses, s’ils n’ont rien à faire avec ce qui vit en réalité dans les choses, on assiste à cette abstraction de la réalité qui commence à se répandre partout. Elle s’est déjà répandue d’ailleurs. Car l’épisode entre Mauthner et le professeur Boll n’est qu’un exemple ridicule. Mais cela se passe partout. 

Et à quoi cela mène-t-il ? À la discorde. Alors qu’on est relativement vite d’accord dès lors qu’on regarde la réalité, lorsqu’on se répand ainsi dans l’irréalité, on arrive très vite à la confrontation. Les gens reconnaîtront peu à peu combien nos événements catastrophiques actuels résultent de cette attitude fondamentale générale qui règne aujourd’hui et de la gravité de cette situation. Faites une enquête, demandez aux gens s’ils ont découvert le paradoxe qui paraît en ce moment dans un grand journal allemand, demandez aux nombreux lecteurs s’ils ont mis le doigt sur le ridicule, sur les contradictions ! Tout cela passe inaperçu ! Mais les événements, eux, ne restent pas inaperçus, ils s’imposent dans toute leur amertume. Car ce qu’on commet ainsi n’est rien d’autre qu’un abus de la force de l’esprit humain. Imaginez que toutes les forces spirituelles gaspillées par leur irréalité, soient appliquées dans le bon sens, elles seraient alors dans le courant normal de l’évolution ; mais autrement elles reviennent à Ahriman. Elles sont ainsi étrangères au courant médian[3], mais elles ont des effets ; cela glisse vers une certaine sphère et c’est cela qui importe. C’est là que réside la gravité de cette situation : ces pensées créent des faits dans une certaine sphère. Elles créent des faits qui ne correspondent pas aux vraies circonstances. Car que ces pensées créent des faits est patent, même extérieurement, rationnellement ou par la pensée.

Notre époque n’est pas portée sur la croyance en l’autorité. Les gens contrôlent et gardent le meilleur ! Et pourtant il arrive naturellement que les gens croient en l’autorité. Une personnalité comme Fritz Mauthner compte d’innombrables adeptes qui le croient sur parole. Un article comme celui-là les impressionnera fortement. Songez à toutes les pensées mises en mouvement par un tel article ! Eh bien, elles sont toutes attirées dans la sphère ahrimanienne, dans laquelle se déverse l’article. Le sujet est irréel et les choses sont ainsi poussées dans l’irréalité. C’est de cela qu’il s’agit.

Ce qu’on désire avec ce genre de choses, mes chers amis, c’est d’insister encore et encore sur le profond sérieux soutenu par ces considérations. Car ce que j’ai caractérisé ainsi, vous le rencontrez à chaque pas. Nous sommes à une époque où nous ne pouvons atteindre les effets recherchés que si nous nous décidons absolument à regarder en toute clarté et objectivité la vie qui nous fait face. C’est notre tâche. La science de l’esprit doit nous y conduire en jetant le pont entre la vie intérieure de l’homme et la réalité. Car c’est sous ce rapport que l’humanité se trouve dans un déplorable brouillard. C’est tout simplement inadmissible, dès qu’on en fait l’examen, ce qui se fait jour par cette vie embrouillée où se complait l’humanité. Il doit certes en être ainsi afin que l’être humain trouve à se reposer sur lui-même. Les êtres humains doivent apprendre à trouver la clarté par eux- mêmes, sans devoir se reposer sur une autorité. Ce sera l’un des acquis les plus importants, grâce à la science de l’esprit, pour chaque âme humaine individuelle ; un jugement clair et sans préjugé sur tout ce que présente la vie ; s’être débarrassé de l’habitude générale de l’humanité actuelle de dormir devant les événements. Les hommes dorment devant ce qui se passe sous leurs yeux (...).

 

[1] Fritz Mauthner, 1849-1923. Auteur d’un Dictionnaire de philosophie. L’article L’Horoscope de Goethe parut dans le Berliner Tagblatt, 47e année 1918, n°161 (édition du soir du 28 mars).

[2] petit livre de la collection « Nature et monde spirituel » : Croyance aux astres et interprétations des astres. Histoire et nature de l’astrologie. Avec la collaboration du prof. Carl Bezold et présenté par le Dr. Franz Boll, Leipzig et Berlin 1918 (extrait de Nature et monde spirituel, vol. 638).

[3] Ndlr : Ici Rudolf Steiner fait référence au courant purement humain. Le courant ahrimanien et le courant luciférien constituent deux autres pôles, tous deux opposés, chacun à leur manière, au courant médian. Voir  l’extrait de conférence « Quelques exemples d’impulsions lucifériennes et ahrimaniennes imprégnant la vie sociale » pour en savoir plus. Cet extrait précède d'ailleurs exactement le précédent extrait dans la conférence en question.

[Caractères gras et italique S.L.]

Rudolf Steiner

 

Note de la rédaction
Un extrait isolé issu d'une conférence, d'un article ou d'un livre de Rudolf Steiner ne peut que donner un aperçu très incomplet des apports de la science de l'esprit d'orientation anthroposophique sur une question donnée.

De nombreux liens et points de vue requièrent encore des éclairages, soit par l'étude de toute la conférence, voire par celle de tout un cycle de conférence (ou livre) et souvent même par l'étude de plusieurs ouvrages pour se faire une image suffisamment complète !
En outre, il est important pour des débutants de commencer par le début, notamment par les ouvrages de base, pour éviter les risques de confusion dans les représentations.

Le présent extrait n'est dès lors communiqué qu'à titre indicatif et constitue une invitation à approfondir le sujet.
Le titre de cet extrait a été ajouté par la rédaction du site  www.soi-esprit.info   

 À NOTER: bien des conférences de Rudolf Steiner qui ont été retranscrites par des auditeurs (certes bienveillants), comportent des erreurs de transcription et des approximations, surtout au début de la première décennie du XXème siècle. Dans quasi tous les cas, les conférences n'ont pas été relues par Rudolf Steiner. Il s'agit dès lors de redoubler de prudence et d'efforts pour saisir avec sagacité les concepts mentionnés dans celles-ci. Les écrits de Rudolf Steiner sont dès lors des documents plus fiables que les retranscriptions de ses conférences. Toutefois, dans les écrits, des problèmes de traduction peuvent aussi se poser.
Merci de prendre connaissance
d'une IMPORTANTE mise au point ici.

 

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