Tablette de Ninnion : Déméter et Perséphone accueillant une procession des Mystères.
Chapitre "Les mystères et leur sagesse" du livre « Le christianisme et les Mystères antiques »
Rudolf Steiner – GA008
Traduit depuis l'allemand par Henriette Bideau
(Aux Éditions anthroposophiques romandes - Édition de 1985)
[Caractères gras : SL]
NDLR : Le présent texte est extrait du livre « Le christianisme et les Mystères antiques » qui est un livre écrit par Rudolf Steiner (même s’il rassemble la substance de 18 conférences faites par lui d’octobre 1901 à mars 1902 à Berlin). Comme il s’agit d’un écrit et non pas de l’impression de notes de conférences prises par des auditeurs ou des sténographes (ces dernières étaient non vérifiées par l’auteur dans la plupart des cas), son contenu est dès lors nettement plus fiable et moins sujet à déformations ou distorsions éventuelles. Ce livre constitue une étude singulièrement précise et documentée de ce que fut l'initiation secrète dans les religions antiques, notamment en Égypte et en Grèce, et de ce qu'elle est devenue dans le christianisme par son fondateur Jésus et par ses successeurs Compte-tenu de la grande importance de cet ouvrage pour comprendre l’anthroposophie, nous en recommandons la lecture en tant qu’un des principaux ouvrages de base (voir la liste ici).
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Quelque chose comme un voile mystérieux dissimule la manière dont, au sein des civilisations antiques, les êtres humains en quête d'une vie religieuse et d'une vie de la connaissance plus profondes que celles que pouvaient leur offrir les religions populaires, satisfaisaient les besoins de leur esprit. Lorsque nous cherchons à savoir comment ils y parvenaient, nous sommes conduits dans le demi-jour de cultes énigmatiques. Toute personnalité qui trouve à satisfaire ces besoins se dérobe pour un temps à nos yeux. Nous voyons que tout d'abord les religions populaires ne peuvent lui donner ce que son cœur cherche. Elle reconnaît l'existence des dieux ; mais elle sait que les conceptions courantes qu'on se fait d'eux ne dévoilent pas les grandes énigmes de l'existence. Elle recherche une sagesse sur laquelle veille avec soin une communauté de prêtres-sages. Son âme, qui aspire à la connaissance, cherche un refuge auprès d'eux. S'ils l'estiment assez mûre, ils la conduisent degré par degré jusqu'à un niveau de connaissance supérieur par un cheminement qui reste invisible pour le monde extérieur. Ce qu'il advient d'elle reste caché au non-initié. Elle semble pour quelques temps, entièrement ravie au monde terrestre, et paraît comme transportée dans un monde secret.
Quand elle reparaît à la lumière du jour, c'est une autre personnalité, complètement transformée, qui se tient devant nous. Une personnalité qui ne trouve pas de mots assez sublimes pour exprimer l'importance de ce qu'elle a vécu. Il lui semble qu'elle a passé par la mort - non pas métaphoriquement, mais dans le sens d'une réalité absolue, et qu'elle s'est éveillée à une vie nouvelle. Et elle voit clairement que celui-là ne peut vraiment comprendre ce qu'elle dit qui n'a pas vécu la même expérience.
Ainsi en advenait-il des personnes initiées dans les Mystères à cet enseignement mystérieux qu'on dérobait au peuple, et qui jetait la lumière sur les questions les plus hautes. Cette religion « secrète » des élus subsistait à côté de la religion populaire. Son origine s'estompe au regard de l'historien et s'efface dans l'ombre qui enveloppe l'origine des peuples. On la retrouve partout chez les peuples de l'antiquité, pour autant que l'on puisse se former une opinion. Les sages de ces peuples parlent des Mystères avec le plus grand respect. Que voilait cette religion secrète ? Et que dévoilait-elle à celui qui y avait été initié ?
L'énigme qui l'entoure devient plus impénétrable encore lorsqu'on s'aperçoit que les Anciens considéraient les Mystères comme quelque chose de dangereux. Le chemin qui menait vers les secrets de l'existence passait par un monde de terreurs. Malheur à celui qui voulait y accéder sans en être digne. Il n'y avait pas de plus grand crime que de « trahir » les secrets à des non-initiés. Le « traître » était puni de mort, et ses biens confisqués. On sait que le poète Eschyle[1] fut accusé d'avoir mis à la scène quelques-uns des secrets des Mystères. Il ne put échapper à la mort qu'en se réfugiant près de l'autel de Dionysos et en prouvant devant les juges qu'il n'avait jamais été initié.
Ce que les Anciens disent de ces secrets est riche de sens, mais aussi ambigu. L'initié est convaincu que dire ce qu'il sait est un péché, et que c'en est un aussi pour un non-initié que de l'entendre. Plutarque[2] parle des terreurs réservées aux candidats à l'initiation et compare leur état à une préparation à la mort. Un genre de vie particulier devait précéder les initiations. Il avait pour but de faire maîtriser les sens par l'esprit. Le jeûne, une vie solitaire, des mortifications, et certains exercices intérieurs devaient conduire à ce but. Les choses auxquelles l'homme s'attache dans la vie ordinaire devaient perdre toute valeur pour lui. Sa vie de sensation et de sentiment devait prendre une autre orientation. On ne peut douter du sens de ces exercices et de ces épreuves. La sagesse qu'on devait offrir à l'initié ne pouvait produire un bon effet sur son âme que s'il avait auparavant transformé le monde de sa sensibilité inférieure. Il était introduit dans le monde de l'esprit. Il devait contempler un monde supérieur. Mais il ne pouvait entrer en rapport avec ce monde sans entraînement et sans épreuves préalables. C'est précisément ce rapport qui importait. Pour penser juste en ces matières, il faut avoir une expérience des faits intimes de la connaissance spirituelle. Il faut sentir qu'il existe deux rapports extrêmement différents avec ce que propose la connaissance suprême. Le monde qui entoure l'homme est tout d'abord son monde réel. Ce qui s'y passe, il le touche, il l'entend, il le voit. Et c'est parce qu'il le perçoit avec ses sens qu'il le dit réel. Il réfléchit à ce qui s'y passe pour s'expliquer comment les choses sont liées entre elles. Mais ce qui, par contre, monte en son âme, ne lui semble pas tout d'abord être une réalité du même ordre. Ce sont pour lui précisément « seulement » des pensées et des idées. Il voit tout au plus en celles-ci des images de la réalité sensible. Elles n'ont elles-mêmes aucune réalité. Car on ne peut ni les toucher, ni les entendre, ni les voir.
Mais il existe un autre rapport avec le monde. Celui qui s'attache exclusivement à la réalité que nous venons de décrire pourra à peine le comprendre. Ce rapport s'établit pour certains hommes à un moment de leur vie. Les rapports qu'ils ont avec le monde extérieur et avec le monde intérieur s'inversent. Ils disent des formes qui surgissent dans leur âme qu'elles sont vraiment réelles. Et ce que les sens entendent, touchent et voient, ils lui attribuent seulement une réalité d'ordre inférieur. Ils savent que ce qu'ils formulent ainsi, ils ne peuvent le prouver, et qu'ils peuvent seulement parler de leurs nouvelles expériences. Qu'avec leurs récits, ils font à l'autre la même impression qu'un voyant qui communiquerait des perceptions visuelles à un aveugle-né. Ils entreprennent de communiquer leurs expériences intérieures dans la confiance qu'ils sont entourés de gens dont l'œil spirituel est certes encore fermé, mais à qui la force de ce qu'ils communiquent permettra de les comprendre par la pensée. Car ils ont foi en l'humanité et veulent être de ceux qui ouvrent les yeux spirituels des êtres humains. Ils ne peuvent que montrer les fruits que leur esprit a lui-même cueillis ; l'autre les verra s'il a de la compréhension pour ce que perçoit le regard spirituel.
Il y a en l'être humain quelque chose qui tout d'abord l'empêche de voir avec les yeux de l'esprit. Pour commencer, il n'est pas du tout orienté ainsi. Il est ce que ses sens font de lui ; et son intellect ne fait qu'expliquer leur travail et en juger. Les sens rempliraient mal leur tâche s'ils ne s'en tenaient pas fermement à la fidélité et à l'infaillibilité de leurs témoignages. Un œil serait un mauvais œil qui, de son point de vue, ne maintiendrait pas que ces perceptions visuelles sont absolument réelles. L'œil a raison en ce qui le concerne, et il ne perd pas sa justification lorsque s'ouvre l'œil spirituel. Celui-ci ne fait que permettre de voir les objets perçus par l'œil physique dans une lumière supérieure. On ne nie d'ailleurs rien de ce que ce dernier a perçu, mais il en émane une lumière nouvelle que l'on ne voyait pas avant. On sait alors que ce qu'on a vu d'abord n'était qu'une réalité inférieure. On voit toujours celle-ci, mais baignée de quelque chose de plus haut qui est l'esprit. Il s'agit alors de pouvoir éprouver et ressentir ce que l'on voit. Celui qui n'éprouve des sensations et des sentiments vivants qu'en face du sensible voit dans les réalités supérieures un mirage, un simple jeu de l'imagination. Ses sentiments ne sont orientés que vers le sensible. Il n'atteint que le vide quand il veut saisir les formes spirituelles, qui lui échappent quand il veut les toucher. Ce ne sont pour lui que des pensées seulement. Il les pense ; il ne les vit pas. Des images l'habitent, plus irréelles que des rêves fugaces. Elles s'élèvent comme des flocons d'écume lorsqu'il se place en face de sa réalité ; elles s'effacent devant l'édifice massif et solidement bâti de la réalité dont lui parlent ses sens. Il en va autrement pour celui dont les sensations, les sentiments vis-à-vis de la réalité se sont transformés. Pour lui, elle a perdu sa solidité immuable et sa valeur absolue. Ses sens ni ses sentiments n'en seront émoussés. Mais ils commencent à douter de leur souveraineté absolue ; ils ménagent un espace libre pour autre chose. Et le monde de l'esprit commence à animer cet espace de vie.
Une possibilité s'ouvre ici qui peut comporter un risque terrible. Il se peut que l'homme perde la faculté d'éprouver et de ressentir vis-à-vis de la réalité immédiate, sans en acquérir de nouvelles. Il flotte alors comme dans le vide. Il se fait l'effet d'un mort. Les anciennes valeurs ont disparu sans qu'il en voie surgir de nouvelles. Le monde et l'homme n'existent plus alors à ses yeux. Mais ce n'est pas là seulement une possibilité. Cela devient un jour une réalité pour chacun de ceux qui veulent accéder à une connaissance supérieure. Il parvient là où l'esprit déclare mort tout ce qui est vivant à ses yeux. Il n'est plus dans le monde. Il est descendu dans le monde inférieur. Il accomplit sa traversée de l'Hadès. Heureux s'il ne fait pas naufrage, si devant lui un monde nouveau s'ouvre. Ou bien il disparaît - ou bien il s'apparaît à lui-même transformé. Dans ce dernier cas, un nouveau soleil et une nouvelle terre seront devant lui. A ses yeux l'univers est rené du feu de l'esprit.
Les initiés dépeignent ainsi ce que les mystères ont fait d'eux. Ménippe[3] raconte qu'il a fait le voyage de Babylone pour être conduit au Hadès et en être ramené par les successeurs de Zoroastre. Il dit qu'il a nagé à travers la grande eau, qu'il a traversé le feu et la glace. Les mystes disent qu'ils ont été effrayés par une épée brandie, et que « le sang coulait ». On comprend ces paroles quand on connaît le passage de la connaissance inférieure à la connaissance supérieure. On a senti soi-même que toute matière solide et toutes les choses sensibles se dissolvaient en eau ; on avait perdu pied. Tous les êtres qu'on avait connus vivants avaient été tués. L'esprit a traversé le monde des sens comme une épée traverse un corps chaud ; on a vu couler le sang de la sensualité.
Mais une vie nouvelle est apparue. On est remonté du monde d'en-bas. L'orateur Aristide[4] en parle : « Je croyais toucher le Dieu, sentir son approche, j'étais entre la veille et le sommeil, mon esprit était tout léger. Aucun homme ne saurait le dire et le comprendre s'il n'est pas 'initié'. »[5] Cette vie nouvelle n'est pas soumise aux lois de la vie inférieure. Le devenir et la mort ne la touchent plus. On peut parler longuement sur l'éternel ; celui qui n'en parle pas comme ceux qui sont descendus au Hadès ne sait ce qu'il dit ; ses paroles ne sont que « vain son et fumée ». Les initiés voient la vie et la mort dans une lumière nouvelle. C'est maintenant seulement qu'ils se sentent autorisés à parler d'immortalité. Ils savent que celui qui en parle sans connaître ceux qui ont passé par l'initiation, dit des choses qu'il ne comprend pas. Il n'attribue l'immortalité qu'à une chose qui obéit aux lois du devenir et de la destruction. - Les mystes ne voulaient pas seulement être convaincus que le noyau de la vie est éternel. Selon la conception des Mystères, une telle conviction serait sans aucune valeur, parce que d'après cette conception, l'éternel n'existe pas à l'état vivant dans le non-myste. Et lorsque celui-ci parle d'un élément éternel, il parle d'un néant. C'est cet être éternel lui-même que cherchent les mystes. Il leur faut tout d'abord l'éveiller en eux ; alors seulement ils auront le droit d'en parler. C'est pourquoi la dure parole de Platon a pour eux pleine réalité qui dit : le non-initié « aura sa place dans le bourbier »[6], et celui-là seul entre dans l'Éternité qui a traversé la vie mystique. C'est dans ce sens seulement qu'on peut comprendre les mots du fragment de Sophocle[7] : « Combien heureux sont les initiés qui parviennent au royaume des ombres. Eux seuls y vivent, aux autres ne sont réservés que la détresse et le malheur. »[8]
Lorsqu'on parle des Mystères, n'en décrit-on pas les dangers ? Ne dépouille-t-on pas un être humain du bonheur, de la valeur suprême qu'il donne à la vie, lorsqu'on le conduit à la porte du monde souterrain ? La responsabilité dont on se charge ainsi est terrible. Et cependant : devons-nous nous dérober à cette responsabilité ? - Telles sont les questions que l'initié devait se poser. Il était d'avis que sa science était à l'âme du peuple ce que la lumière est à l'obscurité. Mais dans cette obscurité réside un bonheur innocent.
Le myste pensait qu'il était sacrilège de troubler ce bonheur. Car que serait-il arrivé en effet s'il avait « trahi » son secret ? Il aurait prononcé des mots, rien que des mots. Mais les impressions et les sentiments qui auraient pu faire jaillir l'esprit de ces mots eussent été absents. Il aurait fallu pour qu'ils soient présents une préparation, les exercices et les épreuves, une transformation complète dans la vie des sens. Sans tout cela, on aurait lancé l'auditeur dans le vide, dans le néant. On lui aurait pris ce qui faisait son bonheur, sans rien lui donner à la place. Et même on n'aurait rien pu lui prendre, car on n'aurait pu transformer la vie de sa sensibilité par de simples paroles. II n'aurait pu ressentir, vivre quelque chose que devant ce que lui offraient ses sens. Tout ce qu'on aurait pu lui donner, c'est un pressentiment terrible, destructeur et rien de plus. Cela eût été considéré comme un crime. Cette attitude n'est plus pleinement valable aujourd'hui lorsqu'il s'agit d'acquérir la connaissance spirituelle. Cette acquisition peut se faire à l'aide des facultés conceptuelles que l'humanité moderne possède, et qui faisaient défaut à celle du passé. Il peut exister de nos jours des hommes qui fassent eux-mêmes l'expérience de la connaissance du monde spirituel ; et ils peuvent trouver devant eux d'autres hommes qui saisissent ces expériences au moyen de concepts. C'est cette faculté de former des concepts qui manquait à l'humanité d'autrefois.
La sagesse antique des Mystères ressemble à une plante de serre chaude qui doit être cultivée et soignée dans un espace clos. Celui qui la transporte dans l'atmosphère de la mentalité quotidienne l'expose à un air où elle ne peut prospérer. Elle s'évanouit devant le jugement caustique de l'esprit scientifique et de la logique modernes. Dépouillons-nous donc pour un temps de l'éducation que nous devons au microscope, à la longue-vue et à la mentalité scientifique ; purifions nos mains que le maniement des scalpels et des acides ont rendues grossières, afin de pouvoir pénétrer dans le pur temple des Mystères. Il faut pour cela être entièrement et réellement disponible.
Ce qui importe tout d'abord pour le myste, c'est l'état d'âme dans lequel il s'approche de ce qu'il ressent comme étant le bien suprême, les réponses aux énigmes de l'existence. À notre époque précisément, où l'on ne veut admettre que la connaissance des réalités grossières, accessibles à l'esprit scientifique d'aujourd'hui, on a peine à croire que dans les choses les plus hautes, tout dépende d'un état d'âme. Or, c'est par là que la connaissance devient une affaire intime de la personnalité. Et pour le myste, c'est ce qu'elle est précisément. Que l'on donne à quelqu'un la solution de l'énigme de l'univers ! Qu'on la lui dépose toute formulée dans la main ! Le myste ressentira que tout cela, ce sont des paroles vides, si la personnalité n'a pas abordé cette solution dans l'attitude requise. Cette réponse n'est rien ; elle s'envole si le sentiment ne s'enflamme pas comme il est nécessaire. Qu'une divinité t'apparaisse ! Elle sera tout ou rien. Elle n'est rien si tu t'avances vers elle comme au-devant des événements journaliers. Elle est tout si tu es préparé intérieurement à cette rencontre. Ce qu'elle est en elle-même ne te concerne pas ; mais qu'elle te laisse comme tu es, ou qu'elle fasse de toi un autre homme, voilà ce qui importe. Mais cela dépend uniquement de toi. Il faut que tu aies été préparé par une éducation, par un développement des forces les plus intimes de la personnalité pour que s'allume et naisse en toi ce qu'une divinité peut faire naître. Ce qui importe, c'est l'accueil que tu fais à ce qui t'est proposé. Plutarque nous a parlé de cette éducation ; il a parlé du salut que le myste adresse à la divinité qui s'approche de lui : « Car le dieu, comme pour l'accueillir, lui adresse la maxime : « Connais-toi toi-même », qui vaut bien sans doute la formule de salutation « Réjouis-toi ». Et nous, en retour, nous disons au dieu : EI, tu es - lui donnant ainsi une appellation exacte et véridique, la seule qui ne convienne qu'à lui seul, et qui consiste à déclarer qu'il existe. - Nous, en effet, nous ne participons pas du tout d'une manière réelle à l'existence. Toute nature périssable, placée entre la naissance et la mort, n'offre d'elle-même qu'une image et une apparence dépourvues de netteté et de consistance. Si l'on veut appliquer son esprit pour essayer de la saisir, il en va comme de l'eau que l'on comprime avec force, qui se coagule du seul fait de cette compression et corrompt tout ce qu'elle touche ; de même, quand la raison recherche la clarté absolue en ce qui concerne chacun des êtres soumis au hasard et au changement, elle s'égare, en se dirigeant tantôt vers leur naissance, tantôt vers leur mort, sans pouvoir jamais rien appréhender de stable ni de réellement existant. On ne peut descendre deux fois dans le même fleuve selon Héraclite, et l'on ne peut pas non plus saisir deux fois dans le même état un être mortel. Des changements vifs et rapides en dispersent les éléments, puis les réunissent à nouveau, ou plutôt ce n'est pas à nouveau, ni plus tard, c'est simultanément qu'il se constitue et se défait, apparaît et disparaît. Aussi ne parvient-il jamais à l'existence dans son devenir qui jamais ne connaît de repos ni d'arrêt. Il ne cesse de se transformer à partir du germe pour produire l'embryon, puis le nourrisson, puis l'enfant, ensuite l'adolescent, le jeune homme, puis l'homme fait, l'homme âgé et le vieillard, détruisant ainsi les premiers stades de son développement et les premiers âges de la vie par les suivants. C'est pourquoi il est ridicule de ne redouter qu'une seule mort, puisque nous en avons subi et en subissons actuellement un si grand nombre. Car non seulement la mort du feu est la naissance de l'air et la mort de l'air est la naissance de l'eau, comme disait Héraclite, mais cette vérité est encore plus claire en ce qui nous concerne : l'homme fait meurt quand naît le vieillard, et auparavant le jeune homme était mort pour faire place à l'homme fait, de même que l'enfant pour faire place au jeune homme, et le nourrisson pour faire place à l'enfant. L'homme d'hier est mort pour faire place à celui d'aujourd'hui, et l'homme d'aujourd'hui est en train de mourir pour faire place à celui de demain. Aucun de nous ne subsiste ni ne reste identique ; nous sommes successivement plusieurs êtres, pendant qu'autour d'une image, d'une forme commune, la matière circule et glisse. Car si nous restions les mêmes, comment nous réjouirions-nous aujourd'hui d'une chose différente de celle qui nous réjouissait hier ? Comment des objets contraires exciteraient-ils notre amour ou notre haine, notre admiration ou notre blâme ? Pourquoi varions-nous dans nos paroles et dans nos sentiments ? Pourquoi notre extérieur, notre figure et notre pensée ne restent-ils jamais identiques ? Il n'est pas possible que l'on passe par des états différents sans qu'il y ait changement et, en changeant, on ne peut rester le même ; mais, si l'on ne reste pas le même, on n'a pas non plus une véritable existence ; l'on change précisément en ceci que l'on devient étranger à ce que l'on était auparavant. Ce sont nos sens qui, par ignorance de l'être véritable, nous font croire faussement que l'apparence a une existence réelle[9].
Plutarque parle souvent de lui-même comme d'un initié. Ce qu'il nous décrit ici est la condition même de la vie du myste. L'homme accède à une sagesse par laquelle l'esprit tout d'abord perce l'apparence, le semblant de la vie des sens. Tout ce que les sens considèrent comme l'être, comme la réalité, est plongé dans le fleuve du devenir. Telle est la condition de l'homme comme de tous les êtres. Il s'évapore devant l'œil de son esprit : sa totalité s'émiette en apparitions éphémères. La naissance et la mort perdent leur signification distinctive ; elles ne sont plus que les moments d'un paraître et d'un disparaître comme tous les autres phénomènes de la vie. Nous ne saurions trouver l'Être suprême dans les rapports entre le devenir et la disparition des êtres. On ne peut le chercher que dans ce qui est vraiment durable, qui contemple le passé et qui pressent l'avenir. Le nouveau degré de connaissance consiste dans ce regard jeté en arrière et en avant. C'est l'Esprit qui se manifeste dans le monde des sens et à travers lui. Il n'a rien à faire avec le devenir sensible. Il ne naît ni ne meurt de la même façon que les phénomènes sensibles. Celui qui ne vit que dans le monde des sens porte en lui cet esprit, mais caché. Celui qui a percé l'apparence du monde visible le possède en lui comme une réalité évidente. En atteignant ce stade, l'être humain développe en lui un nouvel élément. Il ressemble à une plante qui n'avait que des feuilles vertes et qui fait jaillir au sommet de sa tige une fleur aux couleurs éclatantes. Certes, les forces qui font pousser la fleur existaient, invisibles, avant la floraison, mais elles ne sont devenues réalité qu'avec elle. Les forces divines et spirituelles existent aussi, à l'état latent, dans l'homme qui ne vit que par les sens, mais elles ne deviennent une réalité manifeste que dans le myste. C'est en cela que réside la transformation opérée en celui-ci. Par son développement, il a ajouté au monde un élément nouveau. Le monde sensible avait fait de lui un homme doué de sens et l'avait abandonné à lui-même ; la nature avait rempli sa mission. Ce qu'elle pouvait faire avec les forces actives en l'être humain, est achevé. Mais ces forces ne sont pas épuisées pour autant. Elles dorment, comme ensorcelées en l'être humain naturel, et attendent leur délivrance. Elles ne peuvent se délivrer elles-mêmes ; elles s'évanouissent dans le néant si l'être humain ne les saisit pour les faire évoluer, s'il n'éveille pas à une vie réelle ce qui sommeille dans ses profondeurs. - La nature se développe de l'imparfait au parfait. De la matière inanimée, elle conduit les êtres par une longue suite de degrés à travers toutes les formes vivantes jusqu'à l'être humain doué de sens. Celui-ci ouvre les yeux sur lui-même et se perçoit comme un être sensible, réel et changeant. Mais il perçoit de plus en lui les forces d'où ses sens sont nés. Elles ne sont pas l'élément variable en lui, car ce qui est variable est né d'elles. Il les porte en lui, elles sont le signe qu'il existe autre chose en lui que ce qu'il perçoit avec ses sens. Ce qui peut devenir par elles n'est pas encore. Il sent alors briller en lui quelque chose qui a tout créé, y compris lui-même ; et que ce quelque chose sera ce qui lui donnera des ailes pour accomplir une œuvre de nature élevée. Cela est en lui, c'était avant lui, ce sera après lui. Il est devenu par elle, et maintenant il peut la saisir et prendre part à sa propre création. Tels sont les sentiments qui animent le myste après l'initiation. Il a senti ce qu'est l'éternel, le divin. Son action doit devenir partie de l'action créatrice de ce divin. Il peut se dire : J'ai découvert en mon être un « moi » supérieur, mais ce « moi » dépasse les limites de mon existence sensible ; il était avant ma naissance, il sera après ma mort. Il a créé de toute éternité, en toute éternité il créera. Ma personnalité physique est son œuvre. Il m'a incorporé ; il œuvre en moi ; je suis une partie de lui. Ce que je créerai désormais est supérieur aux choses sensibles. Ma personnalité n'est qu'un instrument pour cette force créatrice, pour le divin qui est en moi. - Ainsi le myste a vécu la naissance du dieu en lui-même.
Les mystes appelaient « esprit vrai » ou « daïmon » cette force qui tout à coup brillait en eux. Ils étaient les produits de cet esprit. Dans cet état, il leur semblait alors qu'un nouvel être avait pénétré en eux et avait pris possession de leurs organes. Un être qui se plaçait entre leur personnalité physique et la toute puissante force de l'univers, la divinité. C'est cet esprit vrai que le myste cherchait. « Je suis devenu homme dans la grande nature », se disait-il à lui-même, mais la nature n'a pas achevé sa tâche. Cet achèvement, je dois m'en charger moi-même. Mais je ne puis accomplir cette œuvre dans le grand royaume de la nature à laquelle appartient ma personnalité physique. Ce qui peut se développer dans ce domaine a été développé. C'est pourquoi je dois sortir du règne naturel. Il faut maintenant que je bâtisse dans le royaume de l'Esprit, là où la nature a fait halte. Je dois me créer un air vital que je ne puis trouver dans la nature extérieure. Cet air vital, on le préparait pour les mystes dans les temples où les mystères étaient enseignés. Là on éveillait les forces qui dormaient en eux ; on les transformait en êtres supérieurs, créateurs en natures spirituelles. Cette métamorphose était une délicate éclosion qui n'eût pas supporté l'air rude du grand jour. Mais une fois que l'homme avait accompli sa tâche, elle avait fait de lui un être ferme comme un roc. Il pouvait sortir du temple et braver toutes les tempêtes. Seulement, il n'était pas autorisé à croire qu'il pouvait communiquer directement à d'autres ce qu'il avait vécu.
Plutarque nous communique que « Dans les Mystères il est possible de découvrir les principaux indices qui font apparaître et transparaître la vérité relativement aux génies »[10]. Et Cicéron[11] dit : « Qu'on les développe, ces Mystères, qu'on les réduise à ce que la raison y découvre, on verra qu'ils vont plutôt à expliquer les choses naturelles, qu'à établir la connaissance des dieux. »[12] De telles communications montrent que les mystes recevaient de plus hautes révélations sur la nature des choses que celles données par la religion populaire. On y voit que les êtres spirituels, et les dieux eux-mêmes, avaient besoin d'être expliqués. On en venait donc à parler d'êtres d'une nature supérieure à celle des démons et des dieux, et cela était dans l'essence de la sagesse des Mystères.
Le peuple se représentait les démons et les dieux en images empruntées au monde des sens et à la réalité matérielle. Celui qui avait reconnu la nature de l'Éternel ne devait-il pas douter de l'éternité de tels dieux ? Comment le Zeus de l'imagination populaire aurait-il pu être éternel, lui auquel on attribuait les qualités d'un être éphémère ? - Une chose était claire pour les mystes : l'être humain arrive à la représentation de ses dieux d'une manière différente de celle qu'il emploie pour se représenter d'autres objets. Un objet du monde extérieur m'oblige à me le représenter d'une façon particulière et très précise. En face de cette contrainte, la représentation qu'on se fait des dieux a quelque chose de libre et même d'arbitraire, elle échappe à ce que nous impose le monde extérieur. La réflexion nous apprend que pour la représentation des dieux, il n'y a pas de contrôle extérieur. Ce qui logiquement plonge l'homme dans l'incertitude. Il commence à se sentir lui-même le créateur de ses dieux. Il se demande même : comment en suis-je venu à dépasser la réalité physique dans le monde de mon imagination ? Le myste devait se poser de telles questions. C'étaient pour lui des doutes légitimes. Regardons, pouvait-il penser, les images de tous les dieux, ne ressemblent-elles pas aux êtres qu'on aperçoit dans la vie ? Est-ce que l'homme ne les a pas créés en leur prêtant ou en leur ôtant telle ou telle qualité du monde visible ? L'homme simple qui aime la chasse se crée un ciel où l'on se livre aux chasses les plus magnifiques. Le Grec peuplait l'Olympe de dieux dont les modèles se trouvaient dans la réalité bien connue de lui.
La rude logique de Xénophane[13] a mis ce fait en relief. Nous savons que les anciens philosophes grecs dépendaient tous de la sagesse des Mystères. Nous le démontrerons plus particulièrement à propos d'Héraclite. On peut donc considérer la pensée de Xénophane comme la conviction d'un myste. Il dit :
Les hommes se figurent les dieux créés à leur image,
Ils doivent avoir leurs sens, leur voix et leur corps.
Mais, si les bœufs et les lions avaient des mains
Et savaient s'en servir pour peindre et modeler comme [les hommes,
Ils peindraient et sculpteraient les dieux d'après leurs [propres corps.
Les chevaux les représenteraient comme des chevaux et [le bétail comme des bœufs[14].
Cette découverte peut amener l'être humain à douter de tout ce qui est divin. Il peut rejeter les légendes des dieux et ne plus croire qu'à la réalité de ce qu'il perçoit par les sens. Mais le myste ne devenait pas un sceptique de cette espèce. Celui-ci, il le comprenait, est semblable à une plante qui dirait : Ma fleur rouge est un néant, car j'atteins l'accomplissement avec mes feuilles vertes ; ce que j'y ajoute n'est qu'une apparence trompeuse. Le myste ne pouvait pas davantage en rester aux dieux ainsi créés, aux dieux de la religion populaire. Si la plante pouvait penser, elle reconnaîtrait que les forces qui ont créé les feuilles vertes ont aussi créé la fleur rouge. Et elle n'aurait de repos qu'après avoir étudié ces forces pour parvenir à les contempler. Voilà ce que le myste faisait avec les dieux populaires. Il ne les niait pas, il ne les déclarait pas vains, mais il savait qu'ils sont créés par l'homme. Les mêmes forces, le même élément divin qui agissent dans la nature, agissent aussi dans le myste. Ils créent en lui des images des dieux. Cette force qui crée les dieux, il veut la voir ; elle est quelque chose de plus haut. Xénophane y fait allusion :
Il est un dieu plus grand que tous les hommes
Son corps n'est pas celui des mortels, ni sa pensée leur pensée[15].
Ce dieu était aussi celui des Mystères. On pouvait l'appeler « le dieu caché ». Car l'homme ne saurait le trouver nulle part avec ses seuls sens. Regarde les choses qui sont au-dehors de toi ; tu n'y trouveras rien de divin. Par un effort d'intelligence, tu peux comprendre les lois selon lesquelles les choses naissent et meurent ; mais elle non plus ne te montrera jamais les dieux. Imprègne ton imagination de sentiment religieux ; tu peux alors créer des images que tu peux prendre pour des dieux, mais ta raison te les mettra en pièces, car elle te démontrera que tu les as créées toi-même et que tu en as emprunté la matière au monde des sens. Dès que tu observes ce qui se passe autour de toi en homme intelligent, tu dois nier Dieu. Car Dieu n'est pas là pour tes sens et pour ton intelligence qui t'explique les perceptions sensibles. Dieu est en effet ensorcelé dans le monde, et tu as besoin de sa propre force pour le trouver. Cette force, il faut que tu l'éveilles en toi. Tels étaient les enseignements que le myste recevait autrefois avant son initiation. C'est alors que commençait pour lui le grand drame du monde. Ce drame n'était rien moins que la libération du dieu ensorcelé dans le monde. Où est Dieu ? Cette question se dressait devant l'âme du myste. Dieu n'est pas, mais la nature est. C'est dans la nature qu'il faut le trouver ; car il s'est enseveli en elle comme en un tombeau enchanté. Ces mots : Dieu est Amour, il les entendait dans un sens supérieur. Car Dieu a poussé cet amour à l'extrême ; il s'est sacrifié lui-même par un amour infini ; il s'est répandu, il s'est morcelé dans la multiplicité des êtres. Ils vivent, mais lui ne vit pas en eux. Il gît en eux. Mais il vit en l'être humain. Et l'être humain peut faire en soi-même l'expérience de la vie divine. S'il veut en avoir la connaissance, il faut d'abord qu'il crée, qu'il libère cette connaissance. - Dès lors l'homme regarde en soi-même. Le divin agit en son âme, force créatrice cachée, n'ayant pas encore d'existence. Dans cette âme est un lieu en lequel le divin ensorcelé peut reprendre vie. L'âme est la mère qui peut concevoir le Dieu de la nature ; que ton âme soit fécondée par la nature, et elle enfantera le divin. Il naîtra de ce mariage de la nature avec l'âme. Ce n'est plus alors un Dieu « caché », mais un Dieu manifesté. Il est vivant, sa vie est perceptible, elle chemine parmi les hommes. C'est le Dieu en l'homme, réveillé de son sommeil magique, le Fils du Dieu ensorcelé. Ce n'est certes pas encore le grand Dieu qui fut, qui est et qui sera ; mais en un certain sens, il peut être considéré comme sa manifestation. Le Père demeure caché ; mais le Fils est né de la propre âme de l'homme. La connaissance mystique devient par là un événement réel dans le processus du monde. C'est la naissance d'un enfant de Dieu. C'est un événement aussi réel que tout autre événement dans la nature, seulement il se déroule sur un plan supérieur. C'est le grand secret du myste ; créant lui-même le Fils de Dieu, il le délivre, mais il se prépare tout d'abord à reconnaître ce fils de Dieu créé par lui. Un non-myste n'est pas doué de la faculté qui lui permet de sentir qui est le père de cet enfant. Car ce père dort d'un sommeil magique. L'âme semble l'avoir mis au monde vierge encore. Tous ses autres enfants, elle les a reçus du monde des sens. Là on peut voir, on peut toucher le père. Il vit pour les sens. Le fils de Dieu seul a été conçu du Dieu éternel, caché, du Dieu-Père lui-même[i].
Rudolf Steiner
[Caractères gras ou soulignés : SL]
Notes
[1] Eschyle (vers 525-456 avant Jésus Christ), l'aîné des trois grands tragiques grecs. Il était originaire du lieu de mystère Eleusis.
[2] Plutarque (de Chéronée, vers 45-125 après Jésus Christ), philosophe grec, biographe de l'époque hellénistique-romaine.
[3] Ménippe de Gadara (vers 280 avant Jésus Christ), philosophe grec de l'école cynique. Le passage où cet événement est rapporté n'a pu être déterminé jusqu'ici.
[4] Aristide (129-189 après Jésus Christ), rhéteurs grecs.
[5] « Je croyais toucher le dieu... », Aristide, Hieroi logoi, B 31
[6] Le non-initié « aura sa place dans le bourbier », Platon, Phédon, 69c, Œuvres complètes, édition de la Pléiade, traduction de Léon Robin, page 782.
[7] Sophocle (496-406 avant Jésus Christ), tragique grecque athénien
[8] « Combien heureux sont les initiés… », Sophocle, fragment 837 (selon Pearson) ou 719 (selon Dindorf).
[9] Plutarque : « du E à Delphes », traduction Robert Flacelière, Paris, 1941, pp. 62-63
[10] « Dans les mystères, il est possible de découvrir… », Plutarque, « De la décadence des oracles », traduction de Robert Flacelière, Paris, 1941, page 136.
[11] Marcus Tullius Cicero (106-43 avant Jésus Christ), homme d'état, rhéteur, philosophe et écrivain romain.
[12] « Qu'on les développe ces mystères… », Cicéro, « De la nature des Dieux », traduction de l'Abbé d’Olivet, Paris, 1766, page 152.
[13] Xénophane (de Colophon, vers 580-490 avant Jésus Christ), philosophe et poète pré-socratique.
[14] « Les hommes se figurent… », Xénophane, Fragments B 14 et 15 ; voir également Fragment B 11 et 12.
[15] « Il est un dieu… », Xénophane, Fragment 23, voir aussi Fragment B 24 à 26
Notes de la rédaction
[i] La compréhension de la traduction de ces deux dernières phrases nous semble difficilement compréhensible.
En allemand, il est écrit : « Er hat sinnliches Leben. Der Gottes-Sproß allein ist von dem ewigen, verborgenen Vater-Gott selbst empfangen ».
Une autre traduction pourrait donner ceci :
« Il a une vie sensorielle {ou un vie dans les sens}. Le fils de Dieu seul a été conçu par le Dieu-Père lui-même, éternel et caché ».
Note de la rédaction À NOTER: bien des conférences de Rudolf Steiner qui ont été retranscrites par des auditeurs (certes bienveillants), comportent des erreurs de transcription et des approximations, surtout au début de la première décennie du XXème siècle. Dans quasi tous les cas, les conférences n'ont pas été relues par Rudolf Steiner. Il s'agit dès lors de redoubler de prudence et d'efforts pour saisir avec sagacité les concepts mentionnés dans celles-ci. Les écrits de Rudolf Steiner sont dès lors des documents plus fiables que les retranscriptions de ses conférences. Toutefois, dans les écrits, des problèmes de traduction peuvent aussi se poser allant dans quelques cas, jusqu'à des inversions de sens ! |
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